Extrait de « D-Day 1944 – Voices from Normandy »
 
 
Le Major James Cuthbertson, commandant la 90^ème RASC[i] Compagnie, attachée à la 27^ème Brigade Blindée, avait une tâche spéciale le Jour J. Ses trente-trois camions devaient débarquer à H+6 et se rendre directement aux ponts sur l’Orne, emportant un approvisionnement vital en nourriture, essence et munitions aux soldats aéroportés. Le Major Cuthbertson et un agent de liaison devaient débarquer à Sword Beach à H+2, reconnaitre une route menant à Ranville en moto et établir le premier contact avec le régiment aéroporté.
Le Major James Cuthbertson se souvient de ce jour : « La plage était dans un chaos complet. Nous avons finalement rejoint l’intérieur des terres par Hermanville et nous nous sommes dirigés droit vers l’Orne, sur des voies désertes, sans haies : un paysage nu et découvert. Il n’y avait personne en vue. Nous avons juste suivi nos cartes, en nous hâtant sur 5 miles. C’était très étrange. Où étaient l’ennemi, et nos propres troupes ? Nous avons poursuivi notre route sans voir personne.
« A environ 11H30, après avoir traversé deux villages silencieux, nous avons descendu une petite pente raide et pris un virage brusque menant aux ponts sur l’Orne, où se situe aujourd’hui le Pegasus Bridge. Nous nous sommes arrêtés sous de grands arbres, auprès d’une épaisse haie, et avons entendu quelqu’un crier : « baissez vous, l’ennemi peut vous voir ! ». En regardant plus attentivement, nous avons vu une demi-douzaine de parachutistes en position de défense autour du pont, mais pas d’officier de liaison. Nous sommes restés à l’abri des regards effectuant quelques reconnaissances jusqu’au pont pour voir si les troupes débarquées était arrivées, et aux environs de 13h30, Lord Lovat et ses commandos sont arrivés au pont, descendant par la même route que nous avions utilisées. A part nous-mêmes, c’étaient les premières troupes débarquées à atteindre le pont. »
A 14H00, personne n’étant arrivé du quartier général du régiment aéroporté, James Cuthbertson décida de retourner aux plages pour voir si ses véhicules avaient débarqué et, si oui, les amener avec les fournitures tant attendues.
« Sur le retour, j’ai eu la surprise de ma vie. Neuf véhicules de mon peloton « B » venaient vers moi. Ils ne devaient pas arriver avant J+5 (11 juin) et je ne pouvais tout simplement pas y croire. Ils avaient trouvé de la place sur une barge de débarquement et étaient arrivés malgré tout. »
Après avoir passé ses hommes en revue, le Major Cuthbertson pris à nouveau la route vers les ponts, ne rencontrant toujours personne. Il y arriva vers 17h00, où il prit les choses en main et entreprit de trouver le quartier général du Général Gale. Son problème était de traverser les ponts sous le feu nourri des ennemis.
« Les parachutistes se tenaient à couvert derrière un écran de fumée enveloppant les ponts, j’ai donc traversé dans un brouillard et suivi la route menant de l’autre côté. J’ai finalement atteint le quartier général du régiment aéroporté, situé dans une ferme près de Ranville, qui se trouvait lui-même sous un feu sporadique de mortiers. » 
Il se trouva que les deux guides officiers du régiment qu’il devait rencontrer avaient été blessés, mais le Générale Bale lui ordonna de ramener son convoi après la tombée de la nuit, et de décharger le stock dans une carrière proche.
«  Alors que j’étais au quartier général, à 18h00, nous avons tous écouté le discours du roi, un moment très émouvant. Juste après qu’il ait fini, il y eu un brouhaha alors que des centaines de planeurs et avions nous survolaient, amenant la 6^ème Brigade d’infanterie aéroportée pour renforcer la division aéroportée alors sous intense pression. Il y eut une énorme acclamation, immédiatement suivie de tirs allemands »
Se mettant à nouveau en route sur sa moto, le Major Cuthbertson revient à toute allure vers son rendez-vous à Colleville. Cette nuit-là, il fit son 5^ème trajet le long des routes françaises ventées vers le canal de Caen, rapportant les fournitures tant attendues. Pour ces efforts le jour J, le Major Cuthbertson fut récompensé de la Croix militaire.
 
 
Traduit de l’anglais par Samuel Rivallant